Enjeux spécifiques et rôle du Parc du Vercors

entretien avec B. Joly

    Le Parc naturel régional du Vercors fête ses 40 ans. Il a donc pu voir évoluer les enjeux de l’eau dans le massif. Quels sont-ils ? Et quels rôles la structure Parc a dans ce domaine ? Eléments de réponses par le biais d’un entretien avec Bertrand Joly, chargé de mission Eau et Milieux aquatiques pour le Parc.

    Vous êtes chargé de mission Eau et Milieux aquatiques spécifiquement. Ce poste n’existe pas dans tous les Parcs. Quelles spécificités du Vercors induisent un tel poste ?

    Les enjeux liés à l’eau et aux milieux aquatiques sur les bassins versants de la Bourne et du Furon, au coeur du massif du Vercors, ont amené les acteurs locaux à s’investir dans la gestion, préservation et valorisation de cette ressource essentielle. Comme ces bassins versants sont entièrement dans le périmètre du Parc, il est apparu légitime, d’un point de vue géographique, que le Contrat de Rivière Vercors Eau Pure soit porté par la structure Parc naturel régional du Vercors.
    Les zones du Parc non incluses dans ce contrat de rivière font toutes l’objet de procédures « eau » (contrats de rivière ou SAGE) portés par d’autres structures. Ainsi le Sud du territoire est concerné par le contrat de rivière Drôme, et la partie Est par le Contrat « Gresse, Lavanchon, Drac Aval ». Les SAGE « Drac-Romanche », et « Drôme » s’appliquent aussi sur certaines parties du Parc. Nous gérons les questions de l’eau dans le périmètre du contrat, tout en gardant un oeil sur les autres contrats du territoire.

    Et quels sont les enjeux des bassins versants Bourne et Furon ?

    La partie Sud du Parc, qui se trouve dans le département de la Drôme est sujette à un climat méditerranéen, et est identifiée comme territoire situé en zone de rareté de l’eau. L’eau peu manquer en été pour satisfaire tous les usages. Dans la partie Nord, où il pleut environ deux fois plus, la quantité ne manque pas, et les conflits d’usages sont plus donc limités. Cependant le Vercors est un massif karstique, donc vulnérable. En effet, l’eau s’infiltre rapidement dans ce milieu particulier, l’essentiel de l’eau du massif emprunte des réseaux de circulation souterrains, dans lesquels elle circule très vite. Ceci induit deux conséquences majeures : tout d’abord l’eau n’a pas le temps ni la possibilité d’être filtrée ou épurée par les sols (bactéries, systèmes racinaires, argiles ...) et ensuite elle est très peu stockée à la surface du massif, rendant l’accès à des réserves d’eau parfois très complexe, particulièrement pour l’alimentation en eau potable. Cela nécessite des mesures de gestion appropriées.

    Comment le contrat de rivière porté par le Parc permet-il de répondre à ces enjeux ?

    Le rôle du Parc, comme structure porteuse du Contrat de rivière est de coordonner les actions : dans le contexte karstique, les différents secteurs sont dépendants les uns des autres. il est nécessaire de développer la solidarité entre eux. Dans le cadre du contrat de rivière, nous y travaillons notamment en faisant vivre des réseaux d’échanges d’expériences ou de ressources.

    Nous travaillons aussi à activer la transversalité des actions. Par exemple, des actions sont faites pour aider les agriculteurs à respecter les réglementations en matière d’effluents afin d’éviter les pollutions des eaux et des milieux aquatiques. En complément, il s’agit de travailler sur l’urbanisme, au travers notamment des PLU pour intégrer les problématiques de protection des zones humides, de morcellement des espaces naturels...

    Enfin, il est primordial de pallier au manque de connaissances qui reste un obstacle majeur à l’efficacité des actions menées. Les suivis effectués sur le territoire donnent des éléments de réponse, dans cet objectif un observatoire de l’eau est en train de se mettre en place. De même, de nombreuses études vont être confiées à des bureaux d’études lors du deuxième contrat de rivière.

    Finalement le Parc a-t-il un impact sur le contenu du contrat de rivière ?

    Oui, bien sur, à différents niveaux. Tout d’abord, le périmètre du contrat de rivière se situant sur le territoire du Parc, il suit les grandes orientations de la Charte. Il en est d’ailleurs de même pour les autres procédures « eau » du Vercors.
    Egalement, les Parcs se situent, par définition, sur des territoires riches mais fragiles. C’est le cas en Vercors, où la plupart des cours d’eau sont par exemple listés comme réservoirs biologiques. Le contrat de rivière doit donc prendre en compte ces spécificités même si paradoxalement il est souvent plus difficile de convaincre de la nécessité de se mobiliser pour la préservation du milieu lorsque celui-ci n’est pas encore trop dégradé.

    Enfin, le contrat de rivière est en accord avec le Parc lorsqu’il permet de mener des opérations pilotes ou d’expérimentation comme pour la gestion des plantes invasives. Toujours dans cet « esprit Parc », une réflexion est aussi en cours sur les possibilités de récupération des eaux de pluie comme le faisaient certaines fermes situées loin de sources ou captages d’eau. Utiliser des techniques anciennes (en partie oubliées) et éprouvées pour répondre aux enjeux présents et futurs, cela fait partie de la valorisation des territoires et de leurs potentiels, démarche fondamentale des Parcs.

    Voir : l’eau sur le site du Parc du Vercors